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Le parcours

Avant démarrer sur le sentier, Nicole CRESTEY et Jean-Marc GRONDIN nous livrent quelques explications sur les particularités du site.

Le vent qui souffle sans discontinuer nous fait mieux comprendre ce que l'on peut entendre par milieu difficile. L'anémomorphose (forme donnée par le vent) est une caractéristique des plantes tentant de grandir en bord de mer.

Dans ce cadre pour nous idyllique, les plantes littorales doivent affronter le vent, les embruns et la salinité, un sol fait de laves qui n'est guère propice à la pousse, et pour certaines d'entre elles les effets des marées, sans parler des agressions anthropiques. 

L'adaptation des végétaux à ce milieu très spécifique peut expliquer la présence de plantes patrimoniales en pourcentage supérieur à la norme pour l'ensemble de l'île que l'on peut considérer comme étant de 50% de plantes exotiques pour 50% de plantes indigènes dans la plupart des environnements. Ici, le long de la côte, les exotiques sont moins nombreuses et les plantes patrimoniales dont des endémiques ou des plantes rares, sont majoritaires. Entre les deux, les cryptogènes, celles dont on ne sait pas si elles sont endémiques ou exotiques. La science avance avec beaucoup de retour sur ses certitudes.

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Le bois matelot ci-dessus par exemple est, bien qu'exotique, bien adapté à ces conditions difficiles. Il est rare à la Réunion, abondant ailleurs. 

Le parcours que nous allons emprunter se situe dans une zone sauvée in extremis. Protégée depuis des siècles par la  réglementation héritée des "Pas du Roi", dont la mémoire est bien présente encore, la ville de Saint-Joseph voulait "développer" le site avec marina, hôtels et autres installations pour faire de Vincendo un Saint-Gilles du Sud. Des associations ont engagé un procès qui fut long (2002-2011), et s'est terminé à Bordeaux. Exit la marina, et la petite plage de Vincendo ci-après pourra continuer sa valse hésitation entre galets et sable noir.

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Le Vacoa est ici le roi de la place. Ses représentants se balancent eux et leurs branches flexibles et leurs lourds pinpins au-dessus de nos têtes. C'est la floraison et Jean-Marc GRONDIN ramasse pour nous les faire admirer des inflorescences ??? mâles. Il a aussi recueilli un vacoa juvénile qui tient dans le creux de sa paume.

On a longtemps cru que le Vacoa était une plante exotique. Une analyse fine des tissus de la plante aont montré qu'elle était très proche des endémiques et que donc elle-même devait être endémique.  Le système racinaire du Vacoa est d'une solidité dont peuvent s'inspirer les ingénieurs pour la fabrication de haubans.

Sur la pate-forme rocheuse jouxtant la plage commence l'herborisation. La traînasse est là, ainsi que la Cochlearia paysCentella-asiatica, aux feuilles qui font penser à la violette.

Nous sommes pratiquement engagés maintenant sur le sentier. Les buissons de Manioc bord'mer abondent.

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Au sol court la patate à DurandIpomoea pes-caprae, très abondante partout sur les rivages bas de l'île. À bien y regarder, la feuille fait penser à l'empreinte d'un sabot de chèvre dans un sol sableux, d'où le nom latin (caprae). Elle aime le sable, c'est une psammophile (qui aime le sable). Cette plante est pantropicale, elle se rencontre partout sous les tropiques, ses graines flottantes et résistantes ayant traversés les vastes océans. Les passionnés de  botanique font ainsi des expériences sur la résistance des graines à l'eau de mer. Nicole CRESTEY nous raconte que Darwin demandait à ses enfants de laisser ainsi toutes sorte de graines flotter dans de l'eau de mer pour voir ce qui pouvait arriver après un, voire deux mois. 

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Ailleurs l'herbe pique-fesse s'étale en plaques d'herbe fine où traîne parfois un peu de traînasse bien sûr.

Le vent a creusé des alvéoles dans les blocs de lave, leur a donné des formes étranges que l'on appelé d'un nom corse, les taffonis. Nous n'avons pas retrouvé la tête de mort.

Le sentier est maintenant bordé de buissons de Lansan ??? ou  Baie rose, ou Faux-poivrier, plante mellifère qui contribue à la renommée des miels locaux, miel vert, miel de baies roses, miel de letchis. L'espèce est  envahissante.

Heureux sont ceux qui parmi nous ont passé une enfance créole à "jouer ti 'école" : la feuille de l'herbe tortue servait de feuille à écrire. 

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Quant au crayon à utiliser, ce n'était certes pas le piquant de l'oursin crayon qui eût pu servir. Que de souvenirs ressuscités, dont celui des graines "encre", violettes, avec lesquelles on pouvait faire de l'encre en les écrasant.

Nicole CRESTEY déniche des plants de Lavengère au creux des taffonis, espèce protégée. Voir le site du Conservatoire Botanique National de Mascarin.

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Le Lepturus est une herbe à la queue fine et "maigre" ce qui lui vaut son nom.

Nous avons tous aimé les petites feuilles et les petits fruits rouge des buissons de la Souveraine de mer, comme on peut les voir ci-dessous. Le fruit rouge s'apparente au très en vogue Godji des sites branchés style New Age.

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La LysimaqueLysimachia mauritiana (ci-dessous) a sans doute aussi bien des vertus.

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La plante peut-être la plus emblématique de ce site exposé aux embruns est la Saliette, Asteracée endémique, dont les feuilles patiemment exsudent le sel de mer. 


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Cette plante a pu servir à saler les bouillons de nos grands-parents. Plante protégée.

On trouve sur le bord du sentier des brèdes lastron qui font penser au pissenlit de France.

Nicole CRESTEY déniche une Fimbristylis cymosa, Cyperacée indigène de la même famille que le papyrus. Comme pour la plupart des documents iconographiques, double-cliquer pour agrandir la photo.

Fimbristylis cymosa

  La même croquée par l'artiste d'exquise manière.

La Lobélie nous fait penser au myosotis. 

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Son nom honore la mémoire de Mathias de l'ObelMathias de Lobel ou encore Matthaeus Lobelius (1538 – 3 March 1616), médecin de Jacques Ier, roi d'Écosse, d'Angleterre et d'Irlande. 

Une Hypoxis angustifolia, plante indigène de la Réunion, est repérée.

Chemin Cap Jaune ça l'est long, mais à p'ti pas, p'ti 'pas nous l'a fin arrivé.

C'est le moment de l'"émotion géologique" absolue.

Nicole CRESTEY nous donne alors des explications sur l'histoire géologique du lieu avec les images du très beau livre de l'équipe de Philippe Mairine, Le Piton de la Fournaise, de la contemplation à la compréhension.

Sur le chemin du retour, Nicole CRESTEY nous avait gardé pour point d'orgue à nos explorations naturalistes de la matinée la découverte de la vedette du lieu, la minuscule plante qui a sauvé cette ZNIEFF de l'attaque des bulldozers, la Chamaesyce viridula.

© François DUBAN 2011